Holly de Fien Troch
Cette réalisatrice est sans doute l’une des plus talentueuses et originales en pleine activité dans notre pays aux cultures mélangées. Home était son 4e long-métrage et celui-ci est nourri des mêmes particularités psychologiques et formelles qui font de ce cinéma un témoignage rare sur les grands ados qui semblent vivre « comme tout le monde ». La réalisatrice démontre de façon intimiste sa capacité à capturer ce qui, le plus souvent ne retient pas nos regards pressés.
Holly est une adolescente au comportement un peu replié sur elle-même, peu loquace.
Elle est la copine dans son école du garçon dont tous se moquent car il semble un peu singulier, fragile et colérique. Ce petit monde scolaire et familiale va être dramatiquement ébranlé par un événement tragique qui marquera pour tous un avant et un après mettant en évidence les singularités un peu mystérieuses d’Holly, affligée par ses camarade du sobriquet de « sorcière ». Et tout le film nous rend témoin de ces innombrables petites choses qui ponctuent ces destins tellement ordinaires dans un milieu sociale si bien dépeint.
Rien n’est explicite ou lourdement appuyé. Quelques mains serrées ou posées semblent être le mode d’échange le plus intense de ces émotions qui se partagent, s’observent, se ressentent grâce aux images qui captent magnifiquement les regards, les moues, les colères ou les mutismes qui composent cette guirlande d’émotions. Elles sont toutes induites par la compassion et le souci de l’autre, confronté en quelques rares scènes au cynisme et à la violence qui rend plus nécessaire encore cette fraternité naissante entre personnes fragiles.
Bernadette de Léa Domenach
Elle est très chouette. Pour deux raisons au moins : ce film prouve, s’il était besoin encore, que Catherine Deneuve est une très grande actrice de cinéma. Ici elle porte le film avec une élégance, une intériorité qui la rendent convaincante, drôle et émouvante, première dame, épouse et mère bien souvent malmenée.
La seconde raison est simple : ce film nous replonge dans quelques moments clés de la (longue) carrière politique de Jacques Chirac et nous en évoque des épisodes très savoureux, d’autres plus « politiques » et cela fait toujours du bien de rappeler que la droite française n’a jamais abandonné son ambition de régner sur ce pays. La personnalité de Sarkozy est montrée sans fard et le film n’élude pas le fait que lui, comme son prédécesseur, ont eu maille à partir avec la justice.
Si Michel Vuillermoz fait de louables efforts pour incarner un Président qui a occupé l’Elysée durant 12 années et qui donc est connu de tous, Denis Podalydès est plus convaincant en conseiller et Sara Giraudeau me semble crédible dans le rôle d’une des filles du couple, celle qui joua et joue encore, un rôle politique actif.
Ce film pose évidemment une double question déontologique : peut-on s’emparer sans leur accord du destin de personnes dont certaines sont encore vivantes, et le choix qui est fait des moments évoqués n’est-il pas « trompeur » pour les spectateurs peu informés ?
Ne sommes-nous pas, en d’autres termes, proches des procédés des RS (réseaux sociaux) qui colportent des récits souvent à charge, sans que le travail d’enquête et de débat contradictoire ne légitimise ce type de mise au pilori moderne de la société de politique-spectacle ? Le rôle des journalistes est, à cet égard, un des éléments centraux de cette réflexion.
La réalisatrice dont c’est le premier film, n’ignore rien de ses questions, fille et petite-fille de journalistes dont les carrières n’ont pas toujours été ronronnantes, elle témoigne d’un réelle indépendance vis-à-vis de l’entourage et des personnalités évoquées.
Et somme toute, le film est une distraction très amusante, touchante aussi car il y a une dimension « film de femmes » qui n’épargne guère les goujats machistes, et Chirac en était un bel exemple.
Le choix de l’affiche qui montre une personne qui se fond dans le décors me semble un joli clin d’œil que chacun appréciera après avoir vu le film.