H2S = Sulfure d’hydrogène, un gaz malodorant et (très) toxique selon sa concentration dans l’air. Il provoque une rapide perte de conscience, la paralysie du diaphragme et entraîne la mort. Ce gaz est produit, entre autre, par la décomposition des protéines contenant du souffre, comme celles présentes dans les excréments, le lisier et les algues.
Si ce danger est bien connu dans l’industrie et la gestion des égouts et fosses septiques, le lien avec les algues envahissant les plages, en Bretagne en particulier, a été très difficile à faire reconnaître pour deux raisons : le tourisme et le poids des lobbys agricoles.
C’est ce que nous raconte ce film passionnant. Il nous montre une journaliste qui, à Hillion, dans l’estuaire de Gouessant, au milieu de la côte Nord de la Bretagne, mène une enquête très peu appréciée par les locaux, par la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), par la banque du Crédit agricole, par les lobbys liés aux élevages intensifs.
Et sans vouloir ajouter à l’ambiance anxiogène actuelle due au climat, il faut rappeler que l’extinction des espèces au « permien » il y a 252 millions d’années, serait peut-être due à la production de ce H2S. C’est la 3e des 5 extinctions de masse subies par notre planète et qui a vu disparaître 70% des espèces de terre ferme et 96% des espèces marines. Ce gaz n’est donc pas un « détail ». Et des films de plus en plus nombreux nous parlent très utilement de ces enjeux écologiques, climatiques, médicaux, et autres : Dark Water, Rouge, Goliath, La Fille de Brest ou All the beauty and the Bloodshed e.a.
Ici le scénario est inspiré par une bande dessinée écrite par la journaliste qui a mené l’enquête et que l’on découvre dans ce film, incarnée par Céline Sallette qui n’en est pas à son premier rôle. Elle a 15 ans de carrière, mais comme elle n’est pas « connue » elle en est plus crédible. C’est le cas de l’ensemble d’une excellente distribution qui fait très « terroir » ce qui donne au film un parfum d’enquête réelle. Le réalisateur compte déjà 18 films de fiction à son actif et celui-ci est traité de façon très réaliste, avec une excellente maîtrise de la chronologie car l’histoire se déroule sur des années.
Le personnage qui inspire le rôle principal a travaillé à de nombreuses enquêtes, celles relatives à l’amiante, et sur les « mercuriens », personnes intolérantes aux mercure dans les amalgames dentaires. Son travail de chroniqueuse à France Inter a été très reconnu. Il est frappant de voir que les lobbys sont arrivé à la priver d’antenne !
Bref un film à voir car il contribue de façon remarquable à notre prise de conscience des réalités complexes du monde.
Deux détails encore. Vous verrez que dans le plan en extérieur tourné à Bruxelles, toutes les plaques d’immatriculation sont néerlandaise ! Et dans cette époque où les couples qui ne sont pas simplement « hétéro cis » font l’objet de mille descriptions parfois exhibitionnistes, ici nous avons le plaisir d’en voir un vivre de la façon la plus agréable et ordinaire.